Suisse | Valais

Lors de ma randonnée au Col de Paneirosse, j’avais eu l’envie de visiter le secteur de la cabane du Vélan. La météo annonce une dégradation dans la journée et encore une semaine chargée au travail, donc une forme en demi-teinte.
Me voilà donc une nouvelle fois à Bourg-Saint-Pierre, c’est mon coin à champignons neige de cette saison. L’idée du jour est de monter au Bonhomme de Tselevey et descendre sa face N. Depuis le village de Bourg-Saint-Pierre, un petit portage pour en sortir. Après le passage souterrain, je peux chausser les skis et c’est parti. J’aime bien ce début, la vue se dégage très vite et on profite du fond du Val d’Entremont depuis le Mourin et cie. Il fait grand beau, j’ai bien fait de venir !
Plan du Pey direction La Delisse, puis Cordonna, tout en douceur pour se mettre en jambe. On est un peu au-dessus du chemin d’été où il me semble voir une personne. Dans les pentes S qu’on traverse, il y a quelques anciennes et nombreuses coulées, avec leurs boules de neiges dures, qui mettent un peu de piment dans cette progression tranquille. On passe les chalets de Cordonna. Vers 1900m, il faut monter, via le chemin d’été, le promontoire avant Les Areuses. Quelques conversions et surtout une neige dure qui me fait chuter plusieurs. Je suis tombé par terre, c’est la faute à Voltaire. L’arrêt suivant, les couteaux furent mis pour renvoyer ce poète à son écriture et me laisser tranquille. Les couteaux avaient même du mal à s’enfoncer dans cette neige dure. Neige dure, vie dure !
J’arrive dans le plateau, sous Chalet d’Amont, après la bifurcation Valsorey/Vélan. A partir de là, les traces partent pour la cabane du Vélan où je vois deux personnes dans la pente. Pour ma part, pour le Bonhomme de Tselevey, une vieille trace ainsi que des arabesques de descente. Vers 2400m, il y a une barre rocheuse que je décide de contourner par la gauche, la vieille trace partait à droite, mais les traces de descente à gauche. Les deux solutions se valent apparemment.
A partir de 2400m, en choisissant bien son itinéraire, la pente est douce, mais ce jour ce fut un concerto de voum (bruit sourd du manteau neigeux, synonyme de danger) en DVA majeur. Vu la faible pente, cela ne m’a point inquiété, mais alerté, désormais, je fus. Je traverse ce plateau pour rejoindre la pente dans la face S sous le Bonhomme de Tselevey. Le bulletin avalanche avait spécifié que seul le danger baissait dans cette face (et uniquement elle d’ailleurs). Je retrouve la vieille trace … mais pas les voum, comme annoncé par le bulletin.. J’arrive sur la crête, sous une antécime du Bonhomme de Tselevey et là je décrète que ce sera mon terminus. Je regarde avec envie la pente N, certes le départ est pentu, pardon appétissant, mais l’envie de me retrouver sous 20 cm de neige étant absent, j’abandonnais mon idée de descente. De pleurer, me retenir j’ai dû. Je sais il faut parfois être courageux dans la vie !
Je fais ma pause casse-croute, sous une sorte d’antécime du Bonhomme de Tselevey, faudra que je revienne en été. Le panorama ratisse large, Combin et Vélan en maitres des lieux. En guise de consolation, j’ai envisagé de remonter à la cabane du Vélan, mais l’énergie m’a manqué.
Après ma pause, m’apprêtant à partir, je vois un groupe, déjà repéré, qui arrive dans la combe de Chaux de Jean Mâ. Je décide de les rejoindre, ça mettra de la variété au menu. Je file, toujours avec les peaux, mais je ne suis pas assez rapide pour rejoindre l’homme de tête. Je discute donc avec la femme derrière, c’est un groupe avec un guide … qui a trouvé surprenant que j’aille en solo dans cette pente S ! J’ai trouvé intéressant ce retour d’expérience, car contrairement au guide, j’avais une information supplémentaire : le manteau neigeux y était stable !
Je décide de suivre ce groupe et à la pause suivante, je discute avec le guide Jérome Gottofrey. Selon lui le danger n’est pas de 2, mais 3. De retour à la maison, lecture approfondie du bulletin avalanche, avec les informations collectées. Et ce bulletin décrivait tout avec exactitude. Selon moi, il était parfaitement juste, c’est même du travail d’une grande qualité, hommage à Werner Munter pour la méthode et à ceux qui y travaille tous les jours d’hiver. Pour rappel, un bulletin se compose du degré d’avalanche (1 à 5), d’une rose des vents (dans mon cas, danger 1 pour la pente S) et d’un texte descriptif (ce jour, attention aux accumulations). Bref il faut tout lire, mais vous n’êtes pas obligé de me croire. Ca n’est pas une science dure, donc il peut arriver que ce bulletin comporte des erreurs, mais c’est une aide précieuse.
Avec ce groupe, nous montons sous la Croix de Tsousse, toujours des voum. Le guide s’arrête sous le sommet, la pente se redresse, trop dangereux de continuer.
Je descends avec ce groupe, presque le long de la trace de la montée, le soleil cédant sa place, à l’insu de son plein grès aux nuages. Au pont sous Chalet d’en Bas, on change de rive, désormais rive gauche. Je conseille ce passage, il y a un peu de piment plus loin. Au niveau du mini barrage (Pt1852), on voit une raquette, souvenir des Français pris par une avalanche (danger 3) dans ce coin. Il faut passer sur une planche, c’est le passage pimenté, avec les skis, petite ambiance patinoire.
Ensuite on reste rive gauche, cela évite les remontées de la rive droite. On rejoint la route qu’il suffit de suivre pour retrouver le chemin de la montée. Je me sépare du groupe, remercie le guide de m’avoir accepté et file vers Bourg-Saint-Pierre, trouver refuge dans le bistrot, en attendant le bus.