Suisse | Vaud

Leysin. Il y a une relation amour-haine avec ce village vaudois. D’abord le béton omniprésent, aussi beau qu’un eczéma sur la peau, ses vieux hôtels qui ferment et deviennent des verrues dans le paysage. Puis il y a le cadre (montagnes, lac), le restaurant de la Berneuse dont on peut changer par téléphone la palette de couleur le soir, ses randonnées, Via Ferrata et escalades.
Pour ce lundi de Pentecôte, météo grise annoncée le matin. La veille nous étions allés à La Riondaz et en dernière minute, nous avons trouvé un Bnb pour la nuit. Certes nous sommes presque à côté de chez nous, mais ma tante Nouchka avait des envies de changement. S’il ne manquait une envie de fraises, le tableau serait presque parfait, mais ces envies ne naissent que hors saison, sinon il n’y a plus de plaisir. Quoique ce serait plutôt croûtes au fromage que fraises …
Nous partons depuis le parking du télécabine, Nouchka optant pour la montée par ce moyen (22.- CHF en A/R, sachant que le R n’aura pas lieu). Avec Christian, nous en profitons pour nous alléger et partons à travers Leysin. Puis un passage en forêt, le rythme se fait soutenu, mais le terrain est gras. On rejoint la route forestière qui sert de piste de ski qui serpente pour rejoindre la fromagerie-buvette Le Temeley avec son joli toit en bardeaux. Un groupe de randonneurs se prépare à monter, mais sont plutôt occupés à prendre le café.
Puis le chemin repart dans la montagne pour s’élever à travers les paravalanches en pierres. Ce chemin est selon moi un must local dont chaque randonneur devrait arpenter vaillement les pentes. Que dire sinon que l’âme s’élève, en même temps que le corps, pour embraser la splendeur des lieux, entre nature et travail herculéen pour construire les paravalanches en pierres. Même la télécabine, glissant au-dessus de nos têtes, ainsi que les quelques paravalanches modernes en aluminium, rehaussent en petites touches de modernité ce beau tableau. L’arrivée au Geteillon (2018m) touche presque au sublime, dernier paysage lunaire avant d’atteindre l’herbe tendre de cette antécime de la Berneuse. La vue s’ouvre sur le Léman, telle une ode à la contemplation.
Nous retrouvons la modernité pour arriver au restaurant de la Berneuse (2045m) où je propose, pour ne pas dire impose, un arrêt au restaurant tournant (seulement le deuxième étage) histoire de faire sécher un peu mon t-shirt et reprendre un peu de chaleur (13°c à Leysin).
Nous repartons, avec Nouchka, pour descendre vers le hameau de Aï et son lac, puis par la route (piste de ski) au Lac de Mayen et son étable. Ca n’est qu’ensuite que le chemin repart le long d’un effleurement rocheux. J’avais eu l’occasion de monter par ce chemin pour atteindre la Tour Mayen, mais sous le soleil !
Nous arrivons à la Cabane du Moutonnier (au-dessus du Pt1920) qui est ouverte (une des deux charnières est défaite). La propreté intérieure laisse à désirer, mais nous avons pu profiter du petit espace (un lit, un poêle) pour la pause casse-croûte. Le livre d’or, plein, est d’une lecture délicieuse à condition de le comprendre au second degré. Il semblerait que la jeunesse locale soit en pétard avec l’orthographe et la grammaire. En parlant de pétard, on pourrait soupçonner une certaine consommation …
Le chemin repart pour le lac de Segray, hésite entre partie herbeuse et pierrier. Après ce lac, lové dans une infractuosité, le chemin fait chauffer les muscles pour arriver Sur le Truex où les pentes douces finales contrastent avec la falaise abrupte et vertigineuse de la face N. Ce fut aussi notre seul beau moment de soleil de la journée.
La suite du chemin progresse parmi les lapiaz très esthétiques de Sur le Truex. Il est préférable d’avoir de bonnes semelles Vibram et éviter le temps pluvieux. Le balisage du chemin est serré, le chemin zigzaguant dans ce dédale. Je raffole de ce passage, où nous dansons presque sur le calcaire, à la recherche de l’équilibre parfait pour descendre ces effleurements rocheux pouvant être coupant. La danse du lapiaz prend fin au col sous la Tour du Famelon.
Avec Christian nous montons droit en haut pour atteindre Tour du Famelon, le souffle court, les muscles tendus pour rejoindre le passage de la chaine et du rocher patiné. Le plateau sommital de la Tour de Famelon, 2137.9m, offre un beau panorama sauf que la météo en a décidé autrement.
On rejoint Nouchka, croyant un instant qu’elle avait pris le mauvais chemin (), pour arriver au restaurant des Fers. L’intérieur, comme l’extérieur, est charmant et propose en décoration des reliques de matériel hivernal d’un autre âge. Un panneau indique 1h pour Leysin, mais voyons d’autres touristes, je demande s’il est possible d’être véhiculé. Une seule place est disponible et Christian part avec eux rechercher sa voiture. En attendant nous discutons un peu avec le restauranteur, fort sympa, dont son accent du sud de la France trahit ses origines de Béziers. Il a aussi tendance à diviser en deux le timing, le chemin pour Leysin prend selon lui 30 min (affiché 1h) et en voiture 7 min (on a mis plus de 15 min). Après tout Béziers n’est pas si loin de Marseille où la sardine bouche le port !